Christie Morreale | L’intégration des enfants à besoins spécifiques doit bénéficier de moyens conséquents
Vice-Présidente du Gouvernement wallon, Ministre de l’Emploi, de la Formation, de la Santé, de l’Action sociale, de l’Egalité des chances et des Droits des Femmes
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L’intégration des enfants à besoins spécifiques doit bénéficier de moyens conséquents

Question écrite à Madame Schyns, Ministre en charge de l’enseignement obligatoire

Le mécanisme de l’intégration a pour ambition de promouvoir l’ajustement social  et la formation des élèves à besoins spécifiques. Il permet à des enfants à besoins spécifiques de suivre l’enseignement ordinaire, en bénéficiant d’un encadrement supplémentaire et adéquat, fourni par l’enseignement spécialisé. Mis en place dès 2004 en Fédération Wallonie-Bruxelles, ce mécanisme d’intégration participe au projet de l’école inclusive.

Dans le cadre de l’intégration permanente totale, l’avis n°3 du Groupe Central envisage de limiter ce mécanisme aux élèves dont le parcours scolaire dans l’enseignement spécialisé est effectif, sous-entendant que l’élève doit nécessairement suivre, pendant une durée qui n’est pas précisé, des cours dans l’établissement d’enseignement spécialisé. Cette position m’étonne quelque peu et je souhaite l’éclaircir avec vous. En effet, nous savons que les parents sont parfois rétifs à la fréquentation de l’enseignement spécialisé lorsque la fréquentation de l’enseignement ordinaire apparaît comme la situation adéquate pour le bien-être et le développement de l’enfant mais qu’un encadrement supplémentaire est nécessaire. De plus, je crains qu’en envisageant cette solution, l’enfant fréquentera quelques mois un établissement en attente de pouvoir lancer le mécanisme d’intégration, dans un autre établissement.  Quelle est votre position sur cet aspect ?

En corolaire, les acteurs du Groupe Central précisent que l’élève pour lequel il est possible de répondre d’une manière permanente et totale dans l’enseignement ordinaire ne doit pas s’inscrire dans un dispositif d’intégration mais doit directement bénéficié d’un soutien spécifique. C’est le principe d’une école plus inclusive, auquel j’adhère évidemment mais que nous appliquons encore trop difficilement chez nous. Actuellement, une partie des enfants qui s’inscrivent dans des programmes d’intégration sont avant tout des enfants dont les difficultés sont minimes mais que l’enseignement ordinaire n’est pas parvenu à aider adéquatement, pour lesquels des aménagements n’ont pas pu être mis en place. Pouvez-vous m’indiquer le type de soutien est ici envisagé ? Parle-t-on d’un soutien pédagogique, d’un soutien matériel ou organisationnel ? S’oriente-t-on vers une diminution de l’intégration permanente totale pour s’orienter vers une école plus inclusive ? Dès lors, envisage-t-on de décloisonner réellement l’enseignement spécialisé de l’enseignement ordinaire ?

On entend donc faire sortir ces enfants de l’enseignement spécialisé, ce qui est évidemment positif. Je pense cependant que les moyens qui seront ainsi économisés doivent nécessairement être réinvestis dans l’encadrement et la mise en place des aménagements raisonnables, nécessaires à la bonne poursuite de la scolarité de ces enfants ainsi que dans l’ouverture de plus en plus importante des projets d’intégration. Or, les auteurs estiment que l’augmentation de l’accueil des enfants à besoins spécifiques dans l’enseignement ordinaire nécessite un investissement de 10 millions d’euros mais permettra d’économiser 30 millions d’ici à 2030. L’ensemble de cette somme économisée ne sera pas réinvestie entièrement : 1/3 des économies réalisées, soit 10 millions seront ainsi réinvesties afin d’arriver à un budget égal à 20 millions d’euros par an. Madame la Ministre, quelle est votre position sur cette question ? Les budgets ne devraient-ils pas être réinvesti dans l’encadrement et l’accompagnement des enfants et ainsi en faire profiter l’ensemble des élèves ?

Réponse

Si les processus d’intégration ont bien été mis en place par le décret du 3 mars 2004 organisant l’enseignement spécialisé, ce sont les modifications apportées par le décret du 2 février 2009 qui ont permis leur amplification. En effet, depuis cette date, l’élève ne doit plus fréquenter physiquement l’enseignement spécialisé pour bénéficier d’un accompagnement spécifique, il doit seulement y être inscrit administrativement la première année de l’intégration.

Pour l’année scolaire 2009-2010, l’intégration concernait 523 élèves. A ce jour, ils sont 3 685 élèves à bénéficier d’un tel accompagnement. Leur répartition s’effectue comme suit : 121 en enseignement maternel, 1 864 en enseignement primaire et 1 700 en enseignement secondaire et ce, principalement dans l’enseignement des types 1, 3, 7 et 8[1]. Le tableau que je vous remets à l’instant reprend l’ensemble des données souhaitées.

Quant aux écoles partenaires, les derniers chiffres en ma possession font état de 653 écoles fondamentales ordinaires sur 1 906, de 321 écoles secondaires ordinaires sur 499, de 153 écoles fondamentales spécialisées sur 167 et de 72 écoles secondaires spécialisées sur 99 qui participent aux différents processus d’intégration.

Ces chiffres, comme ceux de l’intégration, sont en progression constante et démontrent, encore une fois, tout l’intérêt porté par une majorité d’établissements à la mise en œuvre et au suivi de projets d’intégration, même s’il faut reconnaître que certains établissements, peut-être par manque d’informations, d’outils ou en difficulté pour s’adapter à l’accueil et au suivi d’élèves porteurs de handicaps, tardent à rejoindre ceux qui, depuis plusieurs années, sur base volontaire, travaillent à développer ce type de projet.

Cependant, en ce qui concerne spécifiquement l’enseignement de type 2, la récente recherche réalisée par l’UCL, sur l’intégration des élèves à besoins spécifiques dans l’enseignement ordinaire, auprès des élèves intégrés, de leur famille et des acteurs scolaires, apporte un éclairage sur la faiblesse de l’intégration des élèves de ce type d’enseignement.

Même si les enseignants de l’ordinaire possèdent une grande liberté dans le choix des outils et des méthodes pédagogiques, leur sentiment de compétence à enseigner aux élèves présentant un retard mental important est très faible. De plus, lorsqu’on leur demande de se positionner entre une scolarisation dans l’enseignement ordinaire ou dans l’enseignement spécialisé, ils sont à tout le moins mitigés pour l’intégration des élèves autistes et nettement contre l’intégration des élèves avec un handicap mental modéré ou sévère. Pour les équipes éducatives, il s’agit davantage d’une intégration sociale que d’une intégration pédagogique.

Le Pacte prévoit d’éviter de cloisonner des enfants dans l’enseignement spécialisé afin que chaque élève trouve la place qui lui convient dans notre système éducatif. Pour améliorer la qualité d’un enseignement inclusif, il est nécessaire d’outiller les enseignants lors de leur formation initiale, notamment en abordant les caractéristiques des différentes populations qu’ils rencontreront au sein de leur classe et les méthodologies leur permettant de répondre aux besoins spécifiques des élèves. S’il est prévu de revenir au pourcentage de 2004 en matière de prise en charge dans l’enseignement spécialisé, cela ne pourra se concevoir que dans le cadre d’une amélioration importante des processus d’intégration et d’inclusion auxquels contribueront en grande partie les pôles territoriaux décrits dans les travaux du pacte.

Le partage des expériences collaboratives entre établissements ordinaires et spécialisés, la mise en œuvre des aménagements raisonnables et la diffusion d’outils adaptés sont aussi des éléments qui devront permettre d’atteindre l’objectif d’un enseignement plus inclusif.


[1] Type 1 : 1 231 élèves en intégration. Type 3 :417 – Type 7 : 306 et Type 8 : 1 422.